AVM : Dans cette logique de diversité des points de vue, quels sont les codes picturaux les plus évidents qui marque une différence entre Chine et France ?
S. G. : « En Chine, comme je vous le disais, les artistes travaillent l’art du vide alors qu’en Occident, c’est l’art du nu qui triomphe pendant des décennies. Au-delà de ça, la plus grande différence artistique est la transformation. Une peinture réussie en Chine est une peinture qui réussit au mieux la transformation des formes indéterminées comme les rochers, les nuages, l’eau et le printemps. Cet art de la transition est un concept que les français ne peuvent comprendre car il est différent de leur vision et de leur perception des choses. Il existe également dans l’art chinois une corrélation entre le texte et la peinture, les peintures sans calligraphies étant très rares. Parfois, il y a une distance allusive entre ce qui est écrit et ce qui est représenté, instaurant ainsi une profondeur sans fin caractéristique de l’art chinois. Ainsi, il se crée une véritable interaction entre l’œuvre et son public, une sorte d’aller-retour entre peinture et nature qui nous est inconnu en Occident. »
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AVM : De quelle manière voulez-vous sensibiliser le public à cette différente culture ?
S. G. : « Le Patronage Laïque organise des concerts, des expositions, des conférences mais aussi des stages et des activités à l’année, dédiées à tous les publics dès 5 ans. Nous proposons également des cours de langue chinoise et de calligraphie. Mais cela ne suffit pas, il faut aussi apprendre au public chinois la culture française en elle-même, apprendre les codes de la République ainsi que la notion de liberté qui ne relève pas du même niveau entre chinois et français, différenciant liberté collective et liberté individuelle. Nous voulons donc ouvrir tous ces chemins possibles à un plus grand nombre et montrer que la pensée que l’on approche n’est pas forcément celle que l’on attend. Pour inventer de nouvelles choses, il ne faut pas s’enfermer dans ses concepts mais partager et aller voir ce qui se fait ailleurs. Le destin de l’art contemporain est de faire cet écart et de profiter des traditions culturelles autres, notamment asiatiques. »
AVM : Au cœur de l’Association Art Vision Monde, comment pourrait-on montrer en Chine cette image de la France ?
S. G. : « Les français sont réputés pour être les enfants gâtés de l’Europe et pourtant ils continuent à se plaindre ! Au contraire, les chinois ne voient que le côté romantique et luxueux de Paris. Il faudrait montrer les français tels qu’ils sont, notamment à travers les campagnes où l’on découvre une autre facette d’un pays, quand toutes les grandes villes se ressemblent. Il ne faut pas rester dans un monde illusoire mais mettre les gens dans leur vraie lumière, avec leurs bons et leurs mauvais côtés. Avec le Patronage Laïque, on fait l’inverse car on présente des œuvres d’art traditionnelles chinoises aux français, mais une démarche réciproque est aussi très intéressante. Elle permet de comprendre sa culture et de construire un monde respectueux et tolérant de chacun, où personne ne se replie sur ses certitudes. Au contraire, c’est le doute qui promeut la connaissance et permet d’avancer dans le futur. »
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